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Marche de Roquemaure à Sorgues : ne pas oublier le Train Fantôme
Le 19 avril 2024 avait lieux une marche entre Roquemaure et Sorgues afin de se souvenir des 750 déportés du Train Fantôme, contraints de marcher sur
le même parcours par leurs gardes S.S., afin de rejoindre la gare de Sorgues puisque la voie ferrée était coupée à Roquemaure. 17 kilomètres sous la chaleur
du mois d’août pour les déportés. La marche avait été organisée par M. Thierry Armant, professeur d’E.P.S. du lycée Jean Giono (Orange), et avait réuni 670
élèves, collégiens comme lycéens, de nombreux établissements.
Départ
Le départ de la marche était programmé pour 9 heures 30. Les personnes qui ne faisaient pas partie d’un établissement scolaire arrivèrent entre 9 heures
et 9 heures 30, les premiers bus scolaires vers 9 heures 20.
Tous les participants se réunirent devant l’entrée du pont que les déportés avaient dû franchir pour passer le Rhône. Aujourd’hui, le pont est détruit,
il n’en reste plus que les piles.
À 9 heures 30, le convoi s’ébranle. Les élèves passent par le pont routier, bloqué à la circulation pour l’occasion. Il fait beau, un petit vent rafraîchit
l’atmosphère
La Marche
Sur le chemin, on découvre de superbes paysages chargés d’histoire : On passe devant la tour de l’Hers, où la légende raconte qu’Hannibal, au temps de la
guerre entre Rome et Carthage, traversa le Rhône ; on découvre les fours à chaux de Châteauneuf-du-Pape, grâce à qui la ville s’appelait Châteauneuf-Calcernier
(« calx » veut dire « la chaux » et « cernere » veut dire « tamiser » en latin) jusqu’en 1838 ; on voit les ruines du château de Châteauneuf-du-Pape ;
on contemple le Mont Ventoux enneigé,… Mais ce dont on se rappelle surtout, c’est du passage des déportés du Train Fantôme. Au milieu des vignes de
Châteauneuf-du-Pape, on se souvient que, affamés, assoiffés et épuisés par leur calvaire, Il ne leur était pas permis de faire des pauses ou de manger le
raisin mûr qui pendait en grappes aux vignes.
Après deux heures de marche, c’est l’arrivée à Châteauneuf-du-Pape, et la pause repas dans un camping. On repart à 12 heures 30, dans le vent.
À 14 heures, c’est l’arrivée devant la gare de Sorgues, où la cérémonie commence à 14 heures 30, une fois tout le monde placé.
La cérémonie
La cérémonie commence par le Chant des Partisans. Puis, trois élèves du collège Jean Giono (Orange) lisent les témoignages de
Marcel Vezol, cheminot à la gare de Sorgues, ayant aidé des déportés à s’enfuir, Marie Santos, déportée du Train Fantôme et Marie Damianie, résidente et
résistante de Sorgues, ayant aidé les déportés en faisant appel à la Croix-Rouge.
Ensuite, l’instigateur du projet, M. Thierry Armant, vient faire un discours en remerciant les élèves d’avoir participer à cette marche, les enseignants de
l’avoir organisée, l’Amicale des 800 déportés du Train Fantôme pour y avoir participer et surtout Mme Teissier pour avoir permis aux élèves d’accéder aux
archives de son défunt mari Charles Teissier.
Le représentant de l’Amicale des 800 déportés du Train Fantôme fait alors un autre discours, pour assurer aux élèves que « les familles de déportés résistants
du Train Fantôme conserveront dans leur cœur ces moments si émouvants [qu’ils leurs ont offert] en empruntant aujourd’hui le chemin que ces morts-vivants
ont parcourus sous la terreur des nazis il y a 80 ans alors que la France se libérait », et pour faire un bref rappel chronologique : deux jours après que
Paris eut été libérée, les déportés arrivaient à Dachau.
Le maire de Sorgues vint ensuite dire quelques mots, s’appuyant sur le monument élevé en hommage aux déportés du Train Fantôme, et insiste sur la nécessité
de la mémoire, ainsi que sur la responsabilité de l’État français dans la déportation.
« C’est pour honorer leur mémoire que vous avez mis vos pas dans les leurs au cours du périple de 17 kilomètres séparant Roquemaure de la gare de Sorgues […].
En faisant cela, vous avez pu vous projeter, et imaginer la souffrance de ces martyrs de la barbarie nazie, et plus généralement de la folie humaine. […]
Avec le Train Fantôme, symbole de la collaboration zélée de l’État Français dans la politique mortifère de déportation du régime nazi, la France a perdu
son âme. »
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Vient ensuite le discours de la Secrétaire d’État auprès du ministre des Armées chargée des Anciens combattants et de la Mémoire, Patricia Miralles. Celle-ci
insiste sur le fait que les jeunes ne sont ni paresseux ni désintéressés de l’histoire, martelant le fait qu’elle a confiance dans les jeunes.
« Il faut avoir confiance dans nos concitoyens, dans notre jeunesse, car l’histoire a montrée qu’à chaque fois, qu’à chaque fois que nécessaire,
les Français ont su avoir un sursaut moral salutaire, et qu’au contraire, ceux qui en doutent, ceux qui disent que c’était mieux avant, se trouvent
souvent, eux, du mauvais côté de l’histoire. »
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Elle insiste ensuite sur le rôle des professeurs, disant qu’ils sont « les hussards de la République, et en ce moment c’est difficile pour eux et je veux leur
apporter tout mon soutien. », avant de planter un rosier, « symbole de la vie qui continue, la même où des crimes furent commis. La vie dans ce qu’elle a de
plus beau […]. C’est aussi le symbole de la République qui se souvient, et ce symbole est d’autant plus fort lorsqu’il est planté par des jeunes, c’est à dire
par ceux qui construisent et qui construiront l’avenir. […] C’est enfin un symbole d’union et un acte de rassemblement car je suis persuadée que quelque soit
l’âge, l’origine sociale, la profession, l’opinion politique ou religieuse, je pense que nous partageons tous la même réjouissance et la même fierté d’avoir
participé à ce moment. »
La cérémonie continue avec le Chant des Marais, hymne officiel de commémoration de la déportation durant la Seconde Guerre mondiale. Ce chant avait été créé dans
le camp de Börgermoor, dans le pays de l’Ems, en Basse-Saxe, puis voyagea de camp en camp au gré des transferts de prisonniers.
C’est ensuite le dépôt des gerbes, au pied du monument en hommage aux déportés du Train Fantôme, avant la traditionnelle sonnerie aux morts et une vibrante
Marseillaise, chantée à l’unisson par l’ensemble des personnes présentes. Puis c’est au tour de la chanson « Nuit et Brouillard » de Jean Ferrat d’être chantée.
La cérémonie se termine alors vers 15 heures 45, et les officiels entrent dans la gare, exceptionnellement ouverte pour l’occasion, où l’on trouve une carte du
parcours du Train Fantôme sur laquelle sont représentées les plaques commémoratives qui se trouvent sur le parcours ainsi que le monument de Sorgues.
Le Télégraphe - Envoyé spécial
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